L’impatience des personnes en situation de handicap et de leurs familles commence à se faire fortement ressentir. Il y a près de 2 mois, parfois plus, les familles de personnes avec un handicap résidant au sein d’une institution ont été confrontées à un sérieux dilemme :
- soit reprendre à la maison, lorsque cela était possible, un fils/une fille en situation de handicap, sans savoir quand le confinement prendrait fin ;
- soit laisser leur fils/leur fille dans le service qu’ils/elles fréquentent sans savoir quand elles pourraient les revoir.
C’était il y a deux mois et le temps semble bien long pour les personnes en situation de handicap et leurs familles, tant pour celles confinées à domicile que pour celles qui en sont éloignées depuis très longtemps. La situation sanitaire a été – et reste – très compliquée à gérer et nous le comprenons très bien.
Des réponses attendues
Ce lundi 4 mai, le déconfinement a pourtant débuté. Il sera certes lent mais il est désormais jalonné de plusieurs étapes permettant à bon nombre d’entre nous d’anticiper et d’entrevoir un peu mieux de quoi demain sera fait. En ce qui concerne le secteur du handicap, nous regrettons qu’aucune échéance n’ait encore été clairement communiquée concernant la possibilité de sortie (ou de rentrée) des personnes résidant dans un service d’hébergement collectif afin de leur permettre de retrouver, le temps d’un week-end ou de quelques jours, leurs proches qu’ils n’ont pas vu depuis de nombreuses semaines.
Nous regrettons que les communications officielles n’apportent pas de réponse et/ou ne mentionnent pas la situation particulière des personnes en situation de handicap en institution. Ces dernières se sentent, à juste titre, souvent peu considérées par les autorités politiques.
Difficultés à gérer l’éloignement et impacts sur la santé
Certaines personnes en situation de handicap intellectuel ou ayant un double diagnostic (personnes présentant un handicap intellectuel et une maladie mentale) ont souvent beaucoup de difficultés à comprendre cet éloignement. Elles ont aussi besoin d’anticiper, de ritualiser les moments de rencontres. Ce sont aussi des personnes pour qui l’utilisation des outils de communication numérique reste particulièrement compliquée, voire tout à fait impossible, certains n’ayant pas accès au langage oral. Cet éloignement prolongé peut avoir des effets très lourds sur la santé mentale de ces personnes pouvant aller jusqu’à une prise en charge d’urgence ou une hospitalisation.
Visites ≠ déconfinement
Bien que certaines visites dans les structures d’hébergement pour les personnes en situation de handicap puissent être autorisées, il faut savoir que la réalité vécue par les personnes en situation de handicap n’est pas la même que celle qui prévaut dans les maisons de repos ou maisons de repos et de soins (MR/MRS), auxquelles les services d’hébergement pour personnes en situation de handicap semblent assimilés dans la stratégie de déconfinement. En effet, les contacts avec les proches dans les MR/MRS se font, en temps normal, généralement par des visites au sein même de la structure. Pour les personnes en situation de handicap, les contacts avec les proches se font au contraire majoritairement lors d’un retour au domicile familial le temps d’un week-end ou de vacances. Ce sont donc les sorties extérieures qui permettent de maintenir le contact avec les proches et non pas des visites intra-muros.
Bien sûr, il y a la responsabilité collective de ne pas mettre en danger les autres résidents et les professionnels qui y travaillent. Ces considérations sont prioritaires.
Néanmoins, Il est important de pouvoir considérer tous ces paramètres pour ne pas imposer aux personnes en situation de handicap et à leurs familles une mise en retrait disproportionnée. Il convient donc de trouver un juste équilibre entre les impératifs de sécurité et les dangers réels d’une part et le bien-être des personnes en situation de handicap, d’autre part. Pour mettre en place ce déconfinement, il conviendra aussi d’accorder la confiance aux proches et aux familles, partenaires essentiels du déconfinement, avec les professionnels, et leur proposer un mode opératoire clair afin de permettre une circulation des personnes en toute sécurité. Cette stratégie reposera sans aucun doute sur la nécessité de répondre à la demande de testing.
Nous demandons donc au Conseil National de Sécurité :
- de prendre ce public spécifiquement en considération et qu’une communication claire soit faite. Les personnes en situation de handicap et leurs familles ont besoin d’entendre la préoccupation des responsables politiques à leur égard ;
- que la communication précitée s’accompagne de propositions concrètes (calendrier et mode opératoire) afin de permettre aux personnes en situation de handicap et leurs familles d’anticiper le déconfinement et de pouvoir se projeter dans l’avenir ;
- de prioriser l’accès aux tests pour les personnes en situation de handicap résidant en institution et leurs proches afin de leur permettre la reprise de contacts familiaux essentiels. Nous entendons que des dépistages de « confort » ont lieu alors que de nombreuses personnes en institution attendent ces tests depuis de longues semaines pour retrouver leurs proches. Il convient donc de considérer très sérieusement leur situation et celle de leurs proches.
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